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Les deux plus grandes religions du monde se rencontrent au Vatican

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Le grand imam d'Al-Azhar et le pape François... (PHOTO AP)

Le grand imam d’Al-Azhar et le pape François s’échangent des cadeaux au Palais du Vatican.

PHOTO AP

Agence France-Presse
Le Caire

Le grand imam d’Al-Azhar, qui a effectué lundi une visite historique au Vatican pour rencontrer le pape François, s’est donné pour mission de renouveler la pensée islamique, sans en remettre en cause les fondamentaux, afin de contrer l’idéologie djihadiste.

Cheikh Ahmed al-Tayeb, 70 ans, avait été nommé en 2010 par l’ancien président égyptien Hosni Moubarak, renversé en 2011 par une révolte populaire. A l’époque haut responsable du Parti national démocrate (PND) de M. Moubarak, il était considéré comme un homme de religion coopté par le pouvoir.

Mais ce philosophe féru de livres a démontré qu’il était aussi un fin politicien, prenant avantage du soulèvement de 2011 pour apporter plus d’autonomie à Al-Azhar, l’un des principaux centres théologiques du sunnisme dans le monde.

Grâce à ses efforts, Al-Azhar élit désormais son chef.

Depuis l’éviction par l’armée du président islamiste Mohamed Morsi en 2013, le grand imam a dû faire preuve d’habilité pour essayer de maintenir l’indépendance de son institution.

Tout comme le patriarche copte-orthodoxe et les principaux dirigeants de l’opposition politique, Cheikh Ahmed al-Tayeb a soutenu l’éviction de M. Morsi menée par l’ex-chef de l’armée et actuel président Abdel Fattah al-Sissi.

En pleine campagne de répression visant les partisans de M. Morsi, le grand imam avait tenté de jouer les médiateurs avec la confrérie islamiste des Frères musulmans, dont le président déchu est issu, pour stopper le bain de sang.

Confronté à une insurrection djihadiste sanglante depuis la destitution de Mohamed Morsi, M. Sissi lui a demandé de «moderniser» la pensée islamique.

Mais cette exigence ne fait pas l’unanimité au sein de l’institution car M. Sissi est un ancien militaire qui ne dispose pas de formation légitime dans le domaine religieux et qui a imposé son pouvoir en réprimant les partisans de l’islam politique.

«Il y a des tensions entre un exécutif qui cherche à révolutionner la religion et Al-Azhar, qui ne pense pas nécessairement que l’État a les compétences pour ouvrir une telle discussion», souligne H.A. Hellyer, politologue au centre de réflexion américain Atlantic Council.

«Ça ne les intéresse pas d’être poussés dans cette direction par quelqu’un qu’ils considèrent comme ne faisant pas partie de l’»establishment» religieux», souligne-t-il.

«Ouvert sur le monde» 

Mais le grand imam milite lui-même pour un discours islamique adapté au XXIe siècle, en particulier pour les musulmans vivant dans des pays occidentaux, et s’est imposé comme l’un des critiques les plus virulents des djihadistes.

Le cheikh d’Al-Azhar dénonce régulièrement les exactions du groupe État islamique (EI) et d’autres organisations djihadistes, qu’il qualifie de «terroristes» qui «souillent l’image de l’islam et des musulmans».

Pour cet ancien professeur de philosophie islamique, titulaire d’un doctorat de La Sorbonne à Paris, toute réforme de la pensée islamique doit toutefois s’inscrire dans le respect des penseurs classiques.

Il veut concilier «le respect de la tradition avec la pensée et la civilisation moderne», résume cheikh Mohamed Mohanna, un de ses conseillers. «Il a étudié en France, il est ouvert sur le monde».

Alors qu’il était à la tête de la prestigieuse université islamique gérée par Al-Azhar, le grand imam avait pour habitude de reprendre ses étudiants sur les règles de vocalisation de la grammaire arabe lors des lectures de textes classiques, tout en leur demandant de garder une certaine ouverture d’esprit quand il s’agissait de parler de philosophie.

«Ces gens, ils ont servi l’islam», a-t-il lancé un jour à ses étudiants, à propos du mouvement rationaliste des Mutazilites, considéré comme des hérétiques par de nombreux penseurs musulmans.

«Je veux dire, être en désaccord avec quelqu’un ne signifie pas qu’ils n’est plus musulman. C’est juste une guerre entre des écoles de pensée, qui a sa place dans les salles de classe», avait-il expliqué.

Le cheikh al-Tayeb est particulièrement inspiré par la grande figure andalouse du soufisme, Ibn Arabi, et a traduit les oeuvres d’orientalistes français sur ce mystique qui a vécu au XIIe siècle.

«Il cherche la sagesse partout où il peut la trouver», assure cheikh Mohanna, son conseiller.

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