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Haïti: un mois après l’ouragan, l’aide reste difficile et sporadique

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Agence France-Presse
LES CAYES

Les troncs d’arbres déracinés jonchent toujours les champs et les plages: si ce n’était les bâches bleues couvrant sommairement les maisons, rien n’aurait changé un mois après le passage dévastateur de l’ouragan Matthew sur la côte sud d’Haïti.

Jean Robert Sima passe encore ses journées au milieu des cocotiers abattus par la tempête d’une rare violence qui s’est abattue sur le sud du pays début octobre. Les quelques mètres carrés de l’unique bâche qu’il a pu récupérer ne protègent pas vraiment son père de 92 ans.

« Un homme, pour qui j’avais fait quelques travaux, nous ouvre sa maison pour passer les nuits car lui est à l’étranger, mais c’est pour quelques jours seulement donc c’est inquiétant », raconte-t-il près du matelas où est allongé le vieil homme.

Jean Robert Sima espère pouvoir reconstruire sa maison mais, avec la perte de ses récoltes, il n’a pas l’argent pour acheter les matériaux et se désespère de ne pas trouver d’aide.

« Aux Cayes, il y a eu des manifestations car certains personnages importants de la ville ont pris l’aide pour eux et l’ont revendue. C’en est arrivé à un point qu’un enfant a été tué », se désole l’agriculteur de 41 ans.

Un adolescent a été tué par balle mardi midi lors du déchargement d’un bateau apportant de l’aide humanitaire.

« Quand il y a une distribution, les gens se poussent, se battent » raconte Jilande, la femme de Jean Robert. « Les responsables haïtiens ne sont pas honnêtes car ils prennent d’abord l’aide pour leurs proches. Vous pouvez être là sans rien avec vos enfants mais ils ne vous donneront rien », accuse-t-elle.

Obtenir une aide quelconque est un défi pour les dizaines de milliers de sinistrés car, compte tenu de l’étendue de la zone affectée par l’ouragan, aucun relevé complet des besoins n’a été réalisé.

À seulement trois kilomètres de l’endroit où se trouve la famille Sima une organisation religieuse a distribué des bâches de plastique et des outils pour construire des abris provisoires.

« On a fait des enquêtes dans des zones reculées, pour vérifier véritablement qui est dans le besoin », explique Enoc Bertrand de l’agence adventiste de développement et de secours.

La centaine de bénéficiaires identifiés reçoivent les kits d’urgence au pied du camion, garé dans l’enceinte du commissariat de police de la petite ville de Roche-à-Bateaux.

« On ne peut pas satisfaire tout le monde donc certaines personnes ne vont rien recevoir et elles pourraient être tentées de faire du désordre si on était dans la rue. Ici on a la quiétude donc la distribution se passe bien », explique Enoc Bertrand.

Les paquets ficelés à l’arrière d’un taxi-moto ou sur le dos d’un mulet, les familles repartent vers leurs maisons sinistrées, sous le regard sombre d’habitants du centre-ville ravagé par l’ouragan.

« Du point de vue des gens, l’aide n’est jamais suffisante et ils ont raison », reconnaît John Ging, le directeur des opérations du bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA). « Mais si on prend un peu de recul et que l’on regarde combien de personnes ont reçu et la qualité de l’aide reçue, c’est une bonne opération.

Il faut bien sûr aller plus vite mais il faut aussi faire correctement les choses », insiste M. Ging, venu vendredi de New York en visite d’inspection.

La question de la sécurité est primordiale tant pour les autorités locales que les agences internationales.

« La frustration de la population est légitime mais l’exprimer en pillant l’aide et perturbant les distributions, ça n’aide personne », affirme le responsable d’Ocha.

Un mois après le passage dévastateur de l’ouragan, le Programme alimentaire mondial (PAM) a déjà distribué une assistance alimentaire à près de 400 000 personnes. Une aide vitale mais insuffisante, l’ONU estime que près de quatre fois plus d’Haïtiens ont un besoin urgent d’assistance.

Et l’argent manque. Le PAM a besoin de 58 millions de dollars pour subvenir aux besoins et organiser la difficile logistique dans les zones reculées. Seuls 18 millions de dollars ont pour l’heure été pourvus.

Ce sous-financement exaspère le directeur des opérations d’Ocha qui dénonce la malhonnêteté des pays riches face à leurs engagements.

« Si le G7 et le G20 respectaient leur engagement de verser 0,7 % de leur PIB pour l’aide au développement, nous aurions 158 milliards de dollars américains en plus de disponibles pour l’aide humanitaire et le développement », fulmine John Ging.

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