«On a trois jours à attendre, attendons tranquillement», a déclaré le président sortant à la chaîne de télévision BFMTV, en réponse à une question sur des enquêtes lui prédisant la défaite.
Depuis longtemps défavorables au sortant, deux sondages publiés mardi soir (CSA) et mercredi matin (BVA) confirment une tendance lourde: le socialiste François Hollande serait en tête au premier tour dimanche avec au moins 29% des suffrages contre 24 à 27% pour Nicolas Sarkozy, à qui il infligerait une défaite cuisante au second tour le 6 mai, avec entre 56 et 58% des voix.
Les traits tirés par la fatigue, le président a tenté de minimiser la signification de ces enquêtes, assurant que celle de CSA, la plus sévère pour lui, était «contradictoire avec tous les autres».
«Je me suis engagé dans cette campagne comme jamais je ne m’étais engagé», a-t-il répété. Il a qualifié la campagne d’«épreuve» tout en assurant qu’il se battrait jusqu’au bout, mais sans oser annoncer la victoire comme il le faisait encore en rassemblement il y a quinze jours.
Beaucoup, y compris dans son camp, n’y croient plus.
«Le coeur n’y est pas vraiment», écrit le journal pro-Sarkozy Le Figaro, qui décrit un président-candidat en apesanteur, bizarrement «détaché et détendu» lors d’une visite de terrain en Bretagne mardi.
Le quotidien relève que «l’apparente hésitation entre deux stratégies (à droite ou plus centriste) lui a fait perdre plusieurs points dans les reports de voix Front national (extrême droite, 14 à 17%) ou Modem (centriste, 11-12%)».
Mercredi matin, le président s’est une nouvelle fois adressé aux électeurs du Front national, dont les voix lui avaient assuré une confortable victoire en 2007, mettant en garde contre un geste d’humeur qui servirait la gauche.
«Le vote pour Marine Le Pen sert qui? François Hollande. À l’arrivée, on a les socialistes, plus d’impôts, plus de taxes», «le droit de vote aux étrangers», a-t-il fait remarquer.
Mais pour Jérôme Sainte Marie de l’institut CSA, Nicolas Sarkozy «n’arrive plus à maintenir mobilisé le peuple de droite».
«Je crois que François Hollande a gagné», a même lancé mercredi matin le député européen écologiste Daniel Cohn-Bendit, évoquant «une volonté d’en finir avec le mandat de Nicolas Sarkozy».
Dès le début, la campagne avait des airs de référendum pour ou contre Nicolas Sarkozy, président à l’impopularité record. Depuis deux jours, François Hollande, qui séduisait plus pour l’alternative qu’il incarnait face au sortant que par adhésion, engrange soutien sur soutien.
Jusqu’ici snobé par les dirigeants européens, le socialiste a reçu mardi l’appui du Belge Elio di Rupo, mais aussi celui d’anciens ministres de Nicolas Sarkozy et, selon des proches, celui de l’ancien président Jacques Chirac.
Le vent en poupe, François Hollande se voulait toujours très prudent avant le vote, soucieux de «rassembler» au maximum au premier tour.
Ennemi déclaré de «la finance» mais promettant une rigueur budgétaire nécessaire à la réduction de la colossale dette française, François Hollande a averti mercredi qu’il n’entendait pas «caler (sa) politique économique sur celle de la projection du FMI (Fonds monétaire international)», dont la prévision de croissance est moins optimiste que la sienne (1% en 2013 contre 1,7% pour les deux favoris du scrutin).
«Je ne peux admettre qu’au nom de la réduction nécessaire des déficits, il soit appliqué des politiques qui, aggravant les conditions de la croissance, ne permettent pas de réduire la dette», a-t-il déclaré à la radio France Inter.
Au quotidien allemand Handelsblatt, il a réaffirmé mercredi qu’il bloquerait le pacte budgétaire cher à l’Allemagne s’il «ne contient pas de mesures de croissance».
Pour sa part, le candidat centriste François Bayrou (crédité d’environ 10% des voix) a de nouveau refusé d’envisager qu’il puisse avoir un rôle d’arbitre entre François Hollande et Nicolas Sarkozy au second tour.
«Je n’ai aucune intention d’accréditer par mes déclarations l’idée que ce deuxième tour (Sarkozy-Hollande, NDLR) serait une fatalité», a-t-il dit.