Fait exceptionnel avant une démission quasi unique au cours des 2000 ans d’histoire de l’Église catholique, le pape a évoqué sa propre personne et «ce moment de sa vie» avant l’Angelus, devant une foule de 100 000 personnes rassemblées Place Saint-Pierre.
«Le Seigneur m’a appelé à « monter sur la montagne », à me dédier encore plus à la prière et à la méditation», a-t-il dit, interrompu à plusieurs reprises par les chaleureux applaudissements d’une foule qui brandissait des banderoles «Saint-Père nous t’aimons», «merci Sa Sainteté», «fidèles aux papes, les papa boys».
«Mais ceci ne signifie pas abandonner l’Église, au contraire. Si Dieu me demande cela, c’est justement pour que je puisse continuer à la servir avec la même intensité et le même amour, comme je l’ai fait jusqu’à présent, mais désormais d’une façon plus adaptée à mon âge et à mes forces», a-t-il poursuivi, louant le ciel avec un sourire pour le retour d’un grand soleil à Rome après plusieurs jours de pluie.
Comme à l’accoutumée, Joseph Ratzinger a ensuite salué les fidèles dans plusieurs langues, et conclu par un message improvisé: «dans la prière, nous serons toujours proches!»
«C’est la dernière fois que nous pouvions le voir», affirme à l’AFP un étudiant espagnol, Enrique Rubio, 22 ans, venu avec d’autres camarades du programme Erasmus. «En partant, il a été honnête et je l’admire. Maintenant, nous avons besoin de quelqu’un comme Jean Paul II, proche des jeunes».
Gianpaolo, 33 ans, de L’Aquila (centre de l’Italie) est là avec ses deux fils: «aujourd’hui la bénédiction était particulièrement importante. Le pape représente l’icône de l’esprit chrétien». Mais il juge Benoît XVI «moins courageux» que ses prédécesseurs, «un pape devant mourir avec son Église».
Coiffées de chapeaux de paille rouge, Linda, Iris et Pamela, bras dessus bras dessous, sont venues du Pays de Galles. Pour elles, Benoît XVI «a fait un choix sensé», mais dommage qu’«il n’ait pas été aussi ouvert que ses prédécesseurs! Le nouveau pape devra être plus ouvert aux gens, aux nouvelles idées».
Un séminariste de 24 ans, de la région parisienne, salue la sobriété de cet Angelus: «il aurait pu verser dans l’affectif (…) mais Benoît XVI ne se retire pas pour que tout s’arrête, il insère son geste dans la succession apostolique depuis deux mille ans».
Venus en touriste, Jean-François et sa femme Dominique 56, de Saint-Jean-de-Luz, sont là par hasard: «il fallait le faire, ça paraît courageux. Mitterrand et Pompidou eux aussi étaient très malades, et ils n’ont pas démissionné!»
Cette période exceptionnelle au Vatican se déroule dans un climat alourdi par des allégations de scandales sexuels publiées dans la presse italienne, qui a évoqué «un lobby gai» au Vatican et d’intrigues de pouvoir et d’argent.
De façon inhabituelle, le Vatican a réagi samedi avec une grande virulence, fustigeant «médisance», «calomnies» et «informations fausses».
Les autorités de Rome avaient mis en place des mesures de sécurité exceptionnelles: plus de 100 policiers et tireurs d’élite postés aux alentours.
Ces mesures servaient également de préparation à l’ultime audience que le pape démissionnaire accordera mercredi, exceptionnellement sur la place Saint-Pierre.
Joseph Ratzinger a annoncé qu’il démissionnait le 28 février à 20 h, en raison de «l’avancement de l’âge» et parce que ses «forces» ne lui permettent plus d’exercer sa charge de chef d’une Église d’un milliard de fidèles.
Un conclave de cardinaux se réunira à la mi-mars pour élire le successeur de Benoît XVI.
Aucun «papabile» ne semble encore se dégager, même si des noms sont répétés: le cardinal canadien Marc Ouellet, l’archevêque de Milan Angelo Scola, le Ghanéen Peter Turkson, le cardinal de Vienne Christoph Schönborn, l’archevêque de San Paolo, Odilo Pedro Scherer, ou encore le Philippin Luis Antonio Tangle.