Il y a deux histoires : l’une officielle, menteuse, puis l’histoire secrète où sont les véritables causes des événements.
Honoré de Balzac
Serge Moise
Les vrais problèmes du pays sont identifiés depuis belle lurette. C’est d’abord la pauvreté engendrée par le chômage endémique qui affecte soixante dix pour cent de la population.
C’est aussi l’indifférence des élites quant à leur rôle de guide de la société.
C’est encore l’échec des trois pouvoirs de l’État. Un gouvernement sans gouvernail, un pouvoir judiciaire toujours vassalisé, une administration publique dysfonctionnelle, un pouvoir législatif pléthorique évoluant aux antipodes de sa mission constitutionnelle qui est de légiférer et de contrôler les actes du gouvernement selon la doctrine de Montesquieu qui veut que le pouvoir arrête le pouvoir.
Or, depuis la fondation de la jeune république, nos politiciens ont toujours fait semblant de respecter les principes démocratiques quand ce n’était pas tout simplement une dictature ni plus ni moins et sans hypocrisie qui exhibait sa face grimaçante et hideuse.
La dernière dont nous subissons encore les contrecoups depuis les vingt-sept dernières années a semble-t-il annihilé en profondeur l’âme haïtienne.
Essayer d’expliquer le comportement de nos acteurs politiques depuis l’arrêt brutal de la présidence à vie serait se perdre dans des conjectures les plus farfelues. C’est à y perdre son créole et son latin.
Les inégalités sociales maintenues à dessein et depuis toujours, l’analphabétisme indécent et contreproductif, la mauvaise répartition de la richesse nationale ont agrandi la fracture sociale au point que les riches deviennent plus riches et les pauvres beaucoup plus pauvres.
Les effervescences auxquelles nous assistons depuis ces dernières semaines n’offrent rien de rassurant quant à un éventuel consensus autour de la bonne marche de la vie politique en général.
Le président de la république au cours de son allocution à l’occasion du dix-huit novembre a lancé une invitation au calme et au dialogue mais en toute objectivité, ce n’était qu’un appel du pied gauche, car en traitant les membres de l’opposition ou certains d’entre eux et même sans les nommer, de faux démocrates, convenons que ces propos maladroits n’ont pas la vertu de créer le climat de confiance indispensable à tout dialogue sérieux et constructif.
Le discours Dessalines versus Pétion ou vice versa n’a rien d’intelligent et de productif, nous le savons tous et fort bien. Le mulâtre qui se croit supérieur à son frère plus foncé, admet implicitement qu’il est inférieur au blanc. Triste choix ! Les fondateurs de la patrie étaient de grands hommes certes, mais nullement infaillibles. L’histoire est un perpétuel recommencement dit le vieil adage, encore faut-il éviter de commettre les erreurs du passé. Devons-nous rappeler que les enfants ne sauraient être tenus responsables des erreurs de leurs ancêtres dans la mesure où ces erreurs sont reconnues comme telles, sans aucune absurde velléité de les occulter.
Des citoyens français ont sillonné les rues du Cap Haïtien afin de présenter des excuses au peuple haïtien pour le triste rôle joué par leurs ancêtres dans l’esclavage à travers ce pays. Ce beau geste, même symbolique devrait servir d’exemple à d’autres mais aussi à beaucoup d’entre nous, en particulier ceux qui ont notoirement démérité de la patrie.
Nous ne pourrons jamais relever ce défi tant et aussi longtemps que nous persisterons à remettre à plus tard cette prise de conscience indispensable à toute rédemption.
La solution à l’imbroglio d’aujourd’hui relève d’une trêve patriotique qui tienne compte des intérêts supérieurs de la nation.
Chaque acteur politique devra faire preuve de désintéressement et de transcendance certaine afin d’en arriver à un gouvernement d’union nationale et sauver ce qui peut encore être sauvé.
En ce début du nouvel an et en plus de toutes les autres bonnes raisons pour ce faire, nos élites seraient bien inspirées d’offrir à la population qui en a grandement besoin, cet acte de dépassement de soi et de transcendance grandiose et magnanime à travers lequel la réconciliation deviendrait une réalité concrète, dans la perspective de lendemains qui chantent pour la nation tout entière.
Que l’année deux mille quatorze soit celle où la création d’emplois deviendra la priorité absolue de et qu’à travers la mise en commun de nos maigres ressources, garder au pays nos millions de bras désœuvrés avec la perspective de rapatrier nos laissés pour compte en république voisine.
Mesdames et messieurs l’heure de la transcendance à sonné, filles et fils de Dessalines et de Pétion, à vous de jouer afin qu’Haïti renaisse de ses cendres parachevant ainsi le rêve sacré des pères fondateurs de la patrie commune.
Serge H. Moïse av.
Barreau de P-au-P.
« Quatre ans après »
C’était il y a quatre ans
Ce terrible tremblement
L’horreur un peu partout
A rendre totalement fou
II
Et le pays s’est effondré
Face à un peuple affamé
Car victime de son passé
Il ne s’y était pas préparé
III
Depuis cette date fatidique
La situation plutôt critique
De la population endeuillée
Ne s’est hélas pas améliorée
IV
Et ces quatre années d’enfer
Avec le mutisme du St-Père
Pourraient bien se prolonger
Oubliées par le monde entier
V
Prenons donc la résolution
De construire notre nation
En éliminant cette division
Qui défie toute interaction
SHM av.