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Le président sortant, qui menace de gripper la transition en refusant de collaborer avec Joe Biden, a limogé lundi son secrétaire à la Défense, Mark Esper.
par Adrien Jaulmes
Joe Biden prépare son entrée en fonction, mais Donald Trump refuse d’accepter le résultat du vote. Une semaine après l’élection et trois jours après que les dépouillements des derniers États ont rendu quasi certaine la victoire du candidat démocrate, les États-Unis sont entrés dans une situation aussi inédite que dangereuse, où le président sortant n’a donné aucun signe laissant apparaître une volonté d’admettre qu’il avait un successeur. Comme si les événements se déroulaient plus que jamais dans deux réalités parallèles, pendant que Joe Biden et ses équipes se préparent à un transfert du pouvoir, Donald Trump continue de contester le résultat, légalement et politiquement. Ce refus bloque le processus de transition et ressemble à un saut dans l’inconnu.
«Cette élection est loin d’être terminée», a écrit lundi l’équipe de campagne de Trump dans un message destiné à lever des fonds destinés à financer des recours en justice: «Les votes LÉGAUX déterminent qui est le président, PAS les médias… Biden n’a PAS été certifié vainqueur, dans AUCUN État».
La situation est inédite, mais n’était pas imprévisible. Le refus de Trump tout au long de la campagne de s’engager à une transition pacifique, ses accusations par anticipation de fraude massive de la part de son adversaire démocrate avaient fait de ce scénario une hypothèse crédible en cas d’un résultat serré. Il a commencé à se dérouler. Donald Trump, qui a passé le week-end au golf pendant que des milliers d’Americains célébraient la victoire de Biden à Washington, n’a pas fait de nouvelles déclarations publiques. Les médias en sont réduits à des spéculations basées sur des sources plus ou moins fiables au sein de la Maison-Blanche.
Un effet politique
Selon ces informations, recueillies par le Washington Post et la chaîne CNN, l’entourage du président serait divisé sur la conduite à tenir. Jared Kushner, le gendre de Trump et l’un de ses principaux conseillers, ainsi que son épouse, Melania, auraient recommandé au président de reconnaître sa défaite. Mais d’autres sources affirment que Kushner, ainsi que l’avocat personnel du président, Rudy Giuliani, et le conseiller de campagne Jason Miller, pousseraient Trump à organiser des rassemblements dans tous les États-Unis pour pousser au recomptage des voix. Kushner n’a pas fait de commentaires, et Miller a nié l’information. Les accusations lancées par le camp Trump sont de plusieurs ordres. Certaines concernent la validité de votes par correspondance, dont une partie ne porterait pas le cachet de la poste pour les certifier. D’autres mettent en cause un programme informatique, en usage dans certains bureaux de vote du Michigan, qui auraient attribué plusieurs milliers de voix républicaines au candidat démocrate. Les équipes juridiques de Trump ont aussi dénoncé le vote d’électeurs décédés mais encore inscrits sur les listes électorales.
Jusqu’à présent, la campagne de Trump n’a pas apporté de preuves pour appuyer ces allégations, et plusieurs des plaintes déposées ont été rejetées par les juridictions de plusieurs États où elles ont été déposées, y compris par des juges républicains. Il apparaît aussi douteux que les faits dénoncés, même avérés, puissent changer le résultat dans un État. Mais ces allégations de fraude généralisée ont un effet politique.
L’idée d’une élection volée par « les médias » et « l’État profond » circule dorénavant parmi les partisans de Trump les plus fervents
La plupart des médias, y compris la chaîne conservatrice Fox News, qui a pris ses distances avec Trump, se sont montrés réticents à relayer ces accusations sans preuve substantielle. Les réseaux sociaux, et notamment le compte Twitter de Trump, qui lui permettaient de se passer d’intermédiaires pour s’adresser à son public, ont commencé à signaler ses messages les plus controversés. Mais l’idée d’une élection volée par «les médias» et «l’État profond» circule dorénavant parmi les partisans de Trump les plus fervents. Ce refus de Trump d’accepter sa défaite a aussi des effets concrets. Le processus de transition, qui repose sur la coopération entre le président sortant et son successeur, s’en retrouve bloqué. Un petit organisme, l’Administration des services généraux, est chargé de donner aux équipes nommées par Biden pour préparer la transition accès à des fonds fédéraux et des documents officiels. Il n’a jusqu’à présent pas répondu aux demandes de la future Administration.
Sans précédent dans l’ère moderne, ce blocage risque de sérieusement entraver la capacité de Biden d’exercer ses fonctions, dans un contexte de pandémie qui nécessitera une réponse globale du gouvernement. Joe Biden n’a jusqu’à présent pas fait référence à ce blocage, et a concentré son message sur la lutte contre le Covid-19, qui a déjà tué près de 240.000 personnes aux États-Unis, alors que l’annonce de la découverte d’un vaccin donne une première lueur d’espoir.
Lundi, Biden a annoncé la création d’un groupe de travail chargé de mettre en œuvre un plan après son entrée en fonction le 20 janvier. «La lutte contre la pandémie de coronavirus est l’une des plus importantes batailles auxquelles notre Administration sera confrontée, et je baserai mon action sur la science et des experts», a dit le président élu, «pour gérer l’augmentation des infections, garantir la sûreté des vaccins et leur distribution efficace, équitable et gratuite, et pour protéger les populations à risque.»
Joe Biden a aussi averti que les Américains sont toujours confrontés à «un sombre hiver». Alors que les infections continuent à se répandre dans tout le pays, Biden a rappelé qu’il pourrait s’écouler des mois avant qu’un vaccin ne soit largement disponible et a incité les Américains à porter un masque, mesure devenue sous Donald Trump un sujet de polémique. «Nous pourrions sauver des dizaines de milliers de vies si tout le monde portait un masque pendant les prochains mois. Pas des vies de démocrates ou de républicains, mais des vies d’Américains», a déclaré Biden. «S’il vous plaît, je vous en prie, portez un masque!»
Lundi, Donald Trump a annoncé sur Twitter le limogeage du secrétaire à la Défense, Mark Esper, et son remplacement par Christopher Miller, l’actuel directeur du Centre national antiterroriste, qui devient secrétaire par intérim «avec effet immédiat». Esper avait suscité la colère de Trump à plusieurs reprises, en particulier en juin dernier, quand le secrétaire à la Défense avait exclu publiquement le recours à des unités de l’armée d’active pour des missions de maintien de l’ordre, comme le réclamait à l’époque Donald Trump.