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Nigel Ficher, responsable a.i de la Minustah
Photo: Vladjimir Legagneur
La communauté internationale lève enfin le voile sur son appréciation réelle du contexte socio-politique haïtien. C’est ce qui ressort des déclarations du représentant spécial du secrétaire général de l’Onu en Haïti, le canadien, Nigel Ficher. Ces déclarations sont jugées très peu diplomatiques, et à la limite déstabilisantes.
Ce que les amis d’Haïti chuchotaient probablement entre eux est maintenant connu de tous. C’est à haute et intelligible voix que le diplomate canadien souscrit à la position de nombre d’investisseurs étrangers et de la communauté internationale sur le pays : « Haïti n’est pas encore ouverte aux affaires ». C’est une douche froide pour le gouvernement Tèt kale. Car, depuis son ascension, le 14 mai 2011 à la magistrature suprême, le président Martelly n’a pas cessé de prôner que le pays était prêt pour recevoir l’investissement direct étranger. Et dans sa quête d’opportunités, nombreux sont les diplomates qui ont soutenu le premier mandataire de la nation dans cette voie. Que s’est-il passé ? M. Fisher évoque le manque de transparence dans les processus d’appels d’offre. La compétitivité serait malsaine à ce niveau. La question des passations de marché fait encore des vagues. Elle semble atteindre cette fois une dimension sensible. Y aurait-il de grands intérêts lésés dans une affaire de contrats ? À en croire le diplomate, M. Martelly avait pleinement conscience de la situation. Cependant, les reformes qu’il avait promises pour redresser la pente, tardent. Entre autres freins majeurs à l’investissement, M. Fisher indexe la faiblesse des institutions haïtiennes. Dans cet ordre, il s’en prend aux acteurs politiques, notamment l’Exécutif et le Parlement qui ne parviennent pas jusqu’à date à mettre sur pied le Conseil électoral pour la tenue des prochaines élections. Acculé, le gouvernement haïtien est mécontent. Les déclarations du chef de la Minustah seraient sévères. Aussi le ministre des Affaires Étrangères, Pierre-Richard Casimir les rejette d’un revers de main. Il estime que le gouvernement s’est beaucoup dépensé en vue d’améliorer le cadre des affaires. Il faut souligner à cet effet la création d’un guichet unique par le ministère du Commerce et de l’industrie (MCI) dont l’objectif est de réduire de 105 à 10 jours, le temps d’implantation d’une entreprise en Haïti. S’ajoute dans cette perspective le recensement d’entreprises initié par le ministère du Commerce et de l’Industrie (MCI) qui consiste à connaître les potentiels de croissance des entreprises haïtiennes afin de les encadrer. Ingérence ? Si certains qualifient les déclarations de M. Fisher d’ingérence, d’autres en revanche y voient un reflet du paysage socio-politique du pays. Bien qu’il reconnaisse que la communauté internationale est partie prenante de la crise qui prévaut actuellement en Haïti, l’économiste Kesner Pharel estime que les faits plaident contre le pays. Il en veut pour preuve le dernier rapport sur la compétitivité relatif à 144 pays. Haïti a été classée dernière position au niveau de la performance institutionnelle. L’économiste s’est également référé aux récentes déclarations du chef de l’Etat lorsqu’il disait que les institutions publiques souffrent d’un déficit de ressources humaines. Le terme ingérence parait impropre à la situation, selon le professeur Mozart Desroneth. Si l’on considère les termes de référence de la mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), c’est de bon droit que M. Fisher, en tant que chef de cette mission tient ce discours. Puisque, selon le professeur, toute situation d’instabilité politique risque d’affecter la sécurité caribéenne, régionale et celle du monde entier. Cependant, il estime que ce serait un peu mesquin si le diplomate se servait de son statut comme prétexte pour régler des contentieux entre États. Des antécédents D’aucuns estiment que l’intervention de M. Fisher est symptomatique d’un malaise entre le Canada et Haïti. On se souvient que le ministre de la coopération internationale du Canada, M. Julian Fantino avait annoncé le gèle des fonds destinés à de nouveaux projets en Haïti pour manque de résultats en matière de développement. Alors que la ministre de l’Economie et des Finances, Mme Marie Carmelle Jean Marie, prenant le contre-pied de cette mesure, affirmait que l’aide canadienne au développement du pays ne vient pas en appui budgétaire. Il revient, selon le grand argentier de la République, aux organisations non gouvernementales et à d’autres organismes canadiens de rendre compte de leur gestion de l’aide en Haïti. Plus d’un se rappelle également les avertissements lancés par le gouvernement canadien à ses ressortissants désireux de visiter Haïti. Les citoyens canadiens devraient, selon le communiqué de l’ambassade, éviter de fréquenter certains quartiers identifiés où l’insécurité bat son plein. Aujourd’hui, c’est par la voix d’un diplomate canadien, que retentissent des déclarations fracassantes relatives à Haïti. Serait-ce une simple coïncidence ? En tout cas le politologue Deroneth estime que les relations entre État à État peuvent être affectées lorsque les intérêts de l’un ou des deux parties sont lésés. Puisque, rappelle-t-il, les États n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts. Entre-temps le gouvernement haïtien doit tout mettre en œuvre pour réaliser les élections. Car les déclarations de M. Fisher, pour le politologue, sont bel et bien la position de l’International qui veut des élections à tout prix cette année. |
Jean Michel Cadet
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