La fin du monde est-elle pour 2012 ? Un frisson traverse la salle – comble – de la Royal Society de Londres, quand l’astrophysicienne Jocelyn Bell Burnell jette la question en pâture.
La scientifique, célèbre pour avoir détecté la première le signal d’un pulsar en 1967, s’est attaquée au sujet parce qu’à la fin de chacune de ses conférences, quelqu’un disait : « tout cela est très bien, mais que pensez-vous de la fin du monde en 2012 ? »
Le scénario catastrophe tire son origine du calendrier maya. Les Mayas, qui croyaient que les dieux faisaient et défaisaient régulièrement le monde, pensaient vivre dans un « compte long » commencé le 11 août 3114 avant Jésus-Christ, et devant s’achever le 21 décembre 2012.
Là où ils pensaient probablement que s’ensuivrait un nouveau « compte long », de nombreux faux-prophètes se sont emparés de la date pour prédire la fin du monde, sous l’effet de causes diverses : chute d’une météorite, alignement des planètes, effet du champ magnétique solaire…
Toutes théories qui mordent d’autant plus sur l’opinion qu’elles sont construites à partir de pseudos éléments scientifiques, constate Mme Burnell. La question posée sur Google fait apparaître quelque 56 millions de références, et certains croient même savoir que la fin du monde est pour 11H11 précisément.
Qu’en est-il ? Le solstice d’hiver intervient bien à 11H12 le 21 décembre, mais sans provoquer à ce jour de catastrophe majeure.
Certains évoquent un renversement du champ magnétique solaire. Ce phénomène existe bien, il se déroule même tous les 11 ans à peu près, avec un pic d’activité variable et des tempêtes solaires plus ou moins importantes. Mais le cycle en cours est marqué par une activité faible, et « le soleil est devenu plutôt calme », observe la scientifique.
Et la Terre ? Certains prédisent qu’elle va également changer son champ magnétique et … tourner dans l’autre sens. De fait, un changement du champ magnétique terrestre est intervenu deux fois depuis la présence de l’Homme sur Terre, la dernière fois il y a 750.000 ans. Mais la Terre tourne toujours dans le même sens, « et nous sommes toujours là », lance la scientifique.
L’alignement des planètes pourrait secouer la Terre au point d’entraîner la fin du monde, avancent certains. Sauf que le prochain alignement n’a lieu qu’en 2040, et que les planètes n’entrent que pour une part infime dans l’attraction terrestre. Le dernier alignement (Jupiter, Venus, Lune, Terre) en 2008 est passé inaperçu.
Restent les météorites, qui peuvent causer de gros dégâts. L’impact d’une météorite de 10 km de diamètre il y a 65 millions d’années au Mexique (Chixculub) serait responsable de la disparition des dinosaures.
Mais les télescopes géants sont aujourd’hui capables de détecter les gros météorites et de calculer le risque de collision, affirme l’astrophysicienne. Les technologies pour les dévier de leur trajectoire existent aussi, comme l’envoi d’une fusée à un point d’impact.
Le plus fantaisiste est peut-être l’hypothèse que nous tombions dans le trou noir au centre de notre galaxie. Sauf que la Terre se situe à 26.000 années lumières du trou, ce qui rend tout à fait impossible d’y être pour le 21 décembre 2012, sans même parler de la gravité et de l’orbite terrestre, qui nous tiennent à bonne distance.
In fine, ce type de prophétie n’a pas de base scientifique, et se nourrit seulement de la crédulité du public, constate la physicienne.
« Pas de doute, vous devrez acheter des cadeaux de Noël pour 2012 », lance-t-elle, hilare.
Jocelyn Bell Burnell a remporté un des principaux prix de la Royal Academy, le prix Michael Faraday de la communication scientifique.