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Mon plus grand rêve est de retourner dans mon pays après mes études. Je suis une patriote de cœur et en réalité je ne me sens confortable que chez moi en Haïti. Je réfléchis souvent au genre d’emploi que j’aimerais avoir une fois mes études terminées. J’avais toujours pensé travailler pour une organisation internationale ou une ONG à mon retour; mais récemment en réfléchissant, j’ai décidé que ce n’était pas la décision idéale pour la citoyenne que je suis.
Je me suis donc demandée pourquoi revenir chez moi et espérer un emploi dans ce genre d’organisation ? J’ai donc cherché à comprendre le sens d’une telle intention. J’ai réalisé qu’en réalité la seule raison est que je me sentirais absolument incapable de travailler dans le système haïtien. Je suis pourtant loin d’être celle qui aime faire des généralisations, mais c’est une réalité pour moi incontournable. S’il me fallait trouver un emploi où mes talents et mes compétences seraient rémunérés convenablement, je ne suis pas certaine que ce serait avec les institutions haïtiennes, encore moins avec les institutions étatiques de mon pays. Pour moi, il se pose donc un problème. Il est courant et devenu quelque peu normal de vouloir se rendre aux Etats-Unis, pays perçu comme la terre d’opportunités. Personnellement, je crois que si un Etat gouvernant a pu laisser une telle mentalité s’installer au sein d’une nation au point de devenir « normale », c’est que cet Etat a échoué – et ainsi tous les gouvernements – pour n’avoir rien changé. J’ai suivi un cours sur la politique économique de l’Asie de l’Est durant lequel le professeur expliquait comment la Corée du Sud est devenue ce qu’elle est aujourd’hui. Une fois de plus, mon pays servait d’outil de comparaison. « Les conditions de vie de la population de ce pays étaient bien plus piètres que celles d’Haïti, du Ghana ou encore de la Somalie. Pourtant, aujourd’hui, la Corée du Sud est une économie forte ». Je suis fatiguée d’entendre ce genre de comparaisons ou de commentaires ; je suis également fatiguée de parler dans mon salon, de me plaindre et de ne rien avoir tenté de changer. Je n’ai d’autres armes que ma plume et ma voix, et je suis certaine de parler au nom d’un grand nombre de personnes. J’ai appris qu’une nation se définit comme tout groupe de personnes liées par leur histoire, leurs valeurs, leurs langues et qui se considèrent partie prenante du même groupe. J’ai donc compris que nous sommes loin d’être une nation. Nous sommes peut-être liés par notre riche histoire, mais les autres facteurs ne sont nullement pertinents pour ce que nous appelons la nation haïtienne. Nous ne partageons pas les mêmes valeurs, pour ne pas dire que nous n’en respectons plus aucune. Notre population est divisée par nos deux langues officielles. Le créole – qui pourtant est la langue parlée par toute la population – n’est toujours pas accepté dans la plupart de nos écoles. Nous donnons à notre langue un caractère péjoratif. Ne parler que le créole me placerait nécessairement au bas de l’échelle sociale. Les menus de nos restaurants sont à présent en anglais. Pourtant malgré la population croissante d’Haïtiens qui vivent en Amérique du Nord, cela ne se passe pas de cette manière. Et finalement, il est plus qu’évident qu’il existe une grande division au sein de notre société où les uns refusent de s’identifier aux autres, soit à cause de la question de langue, soit à cause de la couleur de la peau ou encore de l’origine (capitale/province). Je trouve absolument aberrant et inconcevable qu’en tant que nation nous ne soyons même pas en mesure d’être protégés en cas d’invasion extérieure. Qu’est-ce qu’une nation sans armée ? De plus, nous sommes une moitié d’île, ce qui augmente le nombre de risques auxquels nous faisons face. D’autant plus que l’autre moitié d’île, la République dominicaine, est relativement surarmée. Pourtant durant mes vingt années d’existence, il semble qu’aucun des dirigeants de mon pays n’ait eu l’idée de rétablir notre armée. Nous devons être en mesure d’assurer la protection de nos frontières terrestre, maritime et aérienne. Néanmoins ils préfèrent vivre aux dépens des grandes puissances qui, bien plus qu’évidemment, ont avant tout des intentions purement stratégiques. C’est une humiliation pour moi de me retrouver quelque part et d’être courtisée par ces soldats des Nations unies. Tout comme c’est une humiliation pour moi que de voir des femmes d’un certain statut social se jeter à leurs pieds pour quelque raison que ce soit. |
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Pourtant ce fameux contrat est renouvelé tous les deux ans. Ce n’est pas que nous n’ayons pas besoin de stabilisation, c’est plutôt que nous devrions être en mesure de le faire nous-mêmes. Si après sept ans nous n’y arrivons pas, c’est que nous sommes une nation handicapée. Nous devrions avoir des dirigeants compétents, avec des programmes bien définis, pour faire face à l’environnement tumultueux et instable de notre pays.
C’est aussi humiliant pour moi d’être représentée par certains des sénateurs et députés que nous avons. Il me semble qu’il n’y a aucune exigence ou pré-requis pour devenir un parlementaire. Il me paraît logique que la personne qui me représente, qui prend des décisions pour moi, connaisse ses tâches et ses responsabilités. Il faudrait de plus que cette personne ait un désir de servir la nation au lieu de simplement vouloir se remplir les poches et vouloir jouir de certains privilèges. Il serait peut-être temps de réformer nos lois ou d’implanter une procédure plus stricte et rigide pour la sélection de nos candidats. Nous ne sommes en fait que la risée des grandes nations, des vraies nations. Notre système gouvernemental n’est qu’une pléthore de confusions. Une démocratie est basée essentiellement sur le choix du peuple. Ainsi, si le peuple pense que les dirigeants qu’il a lui-même élus ne font pas un travail satisfaisant, il a le droit de les rejeter et de leur ôter le pouvoir par un vote sanction aux prochaines élections. Mais plus particulièrement, une démocratie repose sur des choix informés. Une nation majoritairement inculte n’est point en mesure de prendre des décisions informées. Ainsi, lorsque moi je vote pour des qualifications spécifiques, une autre personne vote parce que ce candidat lui procure des armes ou plus simplement parce que ce candidat a acquis une certaine popularité dans un autre milieu qui pourtant n’a rien à voir avec la politique. Au bout du compte, mon vote n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan parce que le nombre de gens à voter pour des armes ou des sacs de riz surpasse tous les autres votes. Je suis désolée de dire qu’un président démocratiquement élu en Haïti ne veut absolument rien dire du tout. Certes, il n’existe aucune démocratie au vrai sens du terme. Cependant, il est clair que le choix d’un tel système politique est loin d’aider notre pays. En effet, nos chefs d’Etat ne sont jamais issus d’un parti politique. Pour renforcer notre démocratie, il faut absolument promouvoir davantage nos partis politiques en les intégrant massivement. Il est impératif de puiser des forces dans notre sol. Il faudrait d’abord réduire notre consommation étrangère excessive parce qu’elle rend notre économie déficitaire. Il faudrait de préférence prioriser nos produits locaux, ce qui nous permettrait de générer des revenus qui plus tard, une fois notre économie stabilisée, faciliteraient l’accroissement des exportations de nos produits. Cela permettrait de réduire le déficit de notre balance commerciale par rapport à nos voisins de la République dominicaine. Souvent j’entends dire qu’il faut faire redémarrer notre tourisme. Cependant personne ne veut se rendre dans ce pays à cause de la manière dont il est présenté dans les médias. Le succès de l’industrie touristique requiert des infrastructures appropriées : ports, aéroports internationaux, routes, chaînes d’hôtels, personnel qualifié. Le tourisme marche avec la sécurité. Il faut d’abord garantir celle-ci avant de convaincre les touristes de venir nous visiter. Le terrible séisme de l’an passé nous a pourtant offert une opportunité unique: celle de recommencer à zéro. Cela aurait pu être pour nous le moment d’espérer des changements : le moment de décongestionner la capitale, le moment de se défaire des constructions anarchiques, de replacer tous les édifices gouvernementaux par un bon aménagement du territoire, et l’occasion également de se bâtir un idéal commun. Plus d’un an plus tard, les débris des édifices écroulés encombrent encore les rues de la capitale. Port-au-Prince est surpeuplée et la grande majorité de la population vit dans des conditions quasiment infrahumaines. Les camps pour sinistrés sont l’exemple vibrant de l’inaction du gouvernement. Soraya Louis BA Mass Communication & IPED |