Ses adeptes disent du cardinal, âgé de 64 ans, président du Conseil Pontifical Justice et Paix, qu’il est plutôt progressiste, et il s’est illustré notamment en tant que médiateur lors de l’élection présidentielle ghanéenne de 2008 qui s’est jouée sur le fil du rasoir.
Mais sa décision de présenter, lors d’un récent synode au Vatican, une vidéo de propagande hostile à la démographie des musulmans, pourrait compromettre ses chances de devenir le prochain pape, certains l’accusant de ne pas être à la hauteur sur la question-clé du dialogue interreligieux.
Le cardinal a montré en octobre aux évêques une vidéo circulant sur l’internet depuis quatre ans, intitulée Muslim demographics. Ce film prédit une domination à terme de l’islam en Europe, en raison du très fort taux de fécondité des populations musulmanes.
Il avait ensuite présenté ses excuses, regrettant d’avoir «troublé la sensibilité de certains participants» et assurant qu’il ne souhaitait pas critiquer l’islam, mais dénoncer en Occident «la baisse de la natalité et certaines politiques de planification familiale», parfois exportées dans le reste du monde.
Lors d’un récent entretien diffusé sur une chaîne de télévision catholique française, cet homme souriant aux cheveux grisonnants avait évoqué son enfance en tant que quatrième d’une famille de dix enfants, dans le village de Wassaw Nsuta, dans l’est du Ghana, où son père était charpentier et sa mère marchande de légumes.
Il raconte comment à 13 ans, il a émis le souhait de devenir prêtre, après avoir lu une petite annonce affichée dans l’église qu’il fréquentait. Son père a alors convoqué toute la famille, et a demandé au jeune garçon de faire le choix devant eux entre l’école secondaire et le séminaire.
«Chaque fois que je raconte cette histoire, les gens me disent que j’étais trop jeune pour décider», confiait-il lors de cet entretien, «la réponse pour moi est très simple : si j’avais attendu de vivre une expérience pour décider de m’engager au célibat, je n’aurais jamais pris une telle décision!»
L’archevêque d’Accra Charles Palmer Buckle, qui a été séminariste avec Mgr Turkson, se souvient d’un «leader naturel» et de «quelqu’un de très accessible», qui passait de longues heures à étudier les Écritures saintes et à jouer de la guitare.
Après avoir évolué au sein de séminaires au Ghana et aux États-Unis, Mgr Turkson a étudié à Rome, puis il a été nommé archevêque de la ville côtière de Cape Coast en 1992, jusqu’en 2003 où il est devenu cardinal.
«On l’a toujours considéré comme le chef de l’Église Catholique du Ghana», et en tant qu’archevêque, il a réussi à jeter un pont entre l’Église et le gouvernement du Ghana, qui compte 3 millions de catholiques sur ses 24 millions d’habitants, estime Mgr Buckle.
Aussi, «il a eu un impact énorme sur la vie civique ghanéenne», quand il a joué un rôle de médiateur entre les deux principaux partis, séparés de moins d’un pour cent des voies lors du deuxième tour de la présidentielle en 2008, estime Mgr Matthias Kobena Nketsiah qui lui a succédé en tant qu’archevêque de Cape Coast.
«Le pays entier l’a regardé avec admiration, sans lui, il y aurait eu le chaos», estime l’archevêque.
Alors que certains le qualifient de progressiste, d’autres pensent qu’il y a des chances pour qu’il reste dans la droite ligne de l’Église traditionnelle sur certaines questions de société s’il devient pape.
Mgr Turkson a déjà déclaré qu’il soutenait la position de l’Église contre l’utilisation du préservatif, tout en laissant cette option ouverte pour les couples mariés dont l’un des partenaires est porteur du virus du SIDA.
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