Simon Tremblay-Pépin, chercheur à l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques, était du groupe de 14 commissaires sélectionnés pour la virée du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU). Il a été choqué par plusieurs témoignages. Il certifie notamment qu’une dizaine de femmes au budget serré ont révélé publiquement qu’elles devaient parfois accorder des «faveurs sexuelles» à leur propriétaire en guise de paiement pour le loyer mensuel de leur appartement.
Cet exemple d’une conséquence sur les moins nantis de la hausse des prix est servi pour frapper. Tous les propos lancés par les participants à la Commission populaire itinérante sur le droit au logement n’étaient pas aussi scandalisants. Mais partout où la caravane est passée l’automne dernier, M. Tremblay-Pépin a été surpris par l’ampleur des problèmes, par la pénurie de logements abordables, par les prix qui enflent… par le constat que les difficultés sont similaires dans toutes les localités. «On se disait que le logement, c’est un problème urbain. Ce n’est pas du tout le cas. Il y a des situations assez troublantes partout.»
Des exemples? L’itinérance saisonnière en Gaspésie parce que les logements sont offerts aux touristes à vil prix durant la haute saison; les prix exorbitants des loyers dans les patelins en proie à la folie minière; les «préjugés monstrueux» entretenus par des proprios refusant de louer un appartement à une personne souffrant d’une maladie mentale.
Lors de son passage dans la capitale, il a été longuement question du centre-ville transformé en copropriété géante, des baux hors de prix. «Ça va pousser les gens hors des quartiers centraux.»
Harcèlement de proprios
Plusieurs témoins de la Commission ont d’ailleurs dénoncé le harcèlement de certains propriétaires qui rêvent de vider tous leurs logements afin de les convertir plus facilement en copropriétés. «Ils rendent la vie impossible aux locataires», déplore M. Tremblay-Pépin. «À un moment donné, les gens se disent: « Tant qu’à vivre ça, je vais aller ailleurs. »» Il leur est toutefois ardu de dénicher un autre chez-soi à un prix raisonnable.
Il importe de mettre en place une politique nationale en matière de logement, de reconnaître que le droit au logement est fondamental, de s’assurer que tous peuvent avoir un toit, recommandent les 14 commissaires qui ont sillonné le Québec depuis le Nunavik jusqu’à la vallée du Saint-Laurent.
«Le logement est au coeur de notre vie. Quand ça va bien, on ne s’en rend pas compte», ajoute le représentant local des groupes membres du FRAPRU, Mathieu Houle-Courcelles. Dans tous les secteurs de la capitale, les populations moins fortunées sont touchées par la crue des valeurs foncières, par les loyers à l’avenant. Beauport, Charlesbourg, Sainte-Foy, tous les secteurs de la cité écopent, selon lui.
«Le constat du rapport, c’est que le droit au logement est mis à mal au Québec», enchaîne la porte-parole du FRAPRU, Véronique Laflamme. Il importe donc que les élus municipaux, provinciaux et fédéraux saisissent la balle au bond et instaurent une réflexion sur l’accessibilité au logement.
Une activité de visibilité est organisée aujourd’hui, à 13h, à Québec, pour demander le maintien des investissements du gouvernement fédéral dans le logement social. Rendez-vous au jardin de Saint-Roch.