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Dr Georges Michel
Alors que le président Abinader fait tout pour que les Dominicains se souviennent toujours de la date fatidique du 31 mai 1961 marquant la fin de la dictature de Trujillo,, Jovenel Moïse, Gonzague Day et autres nostalgiques du régime des Duvalier, quant à eux, travaillent d’arrache-pied pour éliminer « 7 février 1986 » dans la mémoire collective.
Il faut lutter de toutes nos forces pour empêcher ce projet malveillant de voir le jour à l’analyse des considérations du journaliste-medecin George Michel. Le projet de Jovenel Moïse, Claude Joseph, Guichard Doré, Herard Abraham dont un arrêt de débet pèse sur le dos, tue la République transformée en un état-voyou et criminel et livré aux gangs.
Le régime Phtk qui prend la République en otage prouve qu’à travers le projet de referendum constitutionnel bidon et illégal, c’est en partie la remise en question des acquis du 7 février 1986. L’ancien constitutionnaliste George Michel, on ne peut plus clair, fait ressortir le danger qui plane sur l’avenir des Haïtiens qui seront, après le 27 juin, renoués avec une nouvelle formule d’une dictature en douceur imposée « légalement » par Jovenel Moïse, un inculpé de blanchiment d’argent.
Retrouver ci-dessous les commentaires et analyses du Dr. Michel qui a passé en revue les différents aspects du projet machiavélique du dictateur Jovenel Moise.
Qu’y a-t-il dans l’avant-projet de constitution dictatoriale?
Des auditeurs et des lecteurs nous ont demandé de relever pour eux les éléments dictatoriaux de l’avant-projet de constitution du Comité consultatif intérimaire. Une lecture attentive en révèle une centaine qu’il serait vraiment trop fastidieux d’inventorier et de commenter. Un tel exercice intellectuel n’intéresserait qu’un lectorat spécialisé et très limité. Il vaut mieux, pour éclairer la grande masse de citoyens ordinaires, en relever seulement les plus importants. Une telle approche est plus simple et plus productive.
L’avant-projet de constitution est constamment dirigé par une volonté malveillante de détruire toutes les institutions nationales que nous avons si péniblement mises en place depuis plus de 30 ans et d’éliminer systématiquement les acquis de 1987.
Voici donc quels sont les points les plus importants de cette entreprise dictatoriale:
1.- Retour du culte de la personnalité;
2.- Perte de la garantie contre l’exil et la saisie arbitraire des biens;
3.- Perte de nombreux acquis de 1987;
4.- Suppression, comme sous Duvalier, du Sénat de la République, les départements perdant leur représentation au Parlement;
5.- Réduction drastique des pouvoirs de la Chambre unique subsistante;
6.- Perte par toutes les communes du pays de leur député propre avec le nouveau découpage démographique antidémocratique;
7.- Perte de la garantie démocratique des élections à deux tours;
8.- Perte de la responsabilité attachée aux actes des trois pouvoirs de l’Etat;
9.- La décharge n’est plus exigée pour être candidat (barrière libre aux voleurs!);
10.- Suppression de tous les mécanismes de contre-pouvoir dont le poste de Premier ministre, le vote de censure contre le gouvernement ou les ministres;
11.- Président omnipotent, ses pouvoirs ne sont plus strictement limités;
12.- Possibilité pour le président de prendre à sa guise des décrets et des ordonnances (un président devenu le roi Charles X ?);
13.- Élimination malveillante de la date hautement symbolique du 7 février;
14.- Deux mandats consécutifs pour le président (10 ans), probablement davantage avec des amendements à volonté (comme en Afrique);
15.- Un vice-président sans aucun pouvoir ;
16.- L’immunité pénale absolue pour le président et ses ministres (disposition absolument immorale et inacceptable);
17.- L’indépendance du pouvoir judiciaire est réduite;
18.- La Cour des comptes perd son indépendance;
19.- L’armée est placée directement sous les ordres du président comme sous Duvalier ;
20.- L’armée n’est plus apolitique;
21.- La police ne dépend plus du ministère de la Justice, ce qui augmente beaucoup son risque de politisation;
22.- La révision constitutionnelle est possible à tout moment comme sous Duvalier;
23.- Les décrets antidémocratiques et anticonstitutionnels de Jovenel Moïse sont tous validés;
24.- Les institutions indépendantes en tant que telles sont éliminées;
25.- Les institutions élues de décentralisation au niveau de la commune et de la section communale sont éliminées;
26.- L’usage du référendum est généralisé en toutes matières, avec toutes les conséquences néfastes que l’on connaît.
En substance, l’avant-projet de constitution du CCI est la dictature Duvalier habillée d’autres oripeaux. Il vise dans son essence à détruire la démocratie et à tuer toute vie politique démocratique en Haïti. Nous allons être plongés par lui du jour au lendemain dans une dictature pure et dure qu’il faudra combattre.
Que nous prend-on ? Les acquis de 1986, les avancées démocratiques, les garanties constitutionnelles, les institutions.
Que nous donne-t-on en échange ? Un président-dictateur omnipotent, concentrant tout entre ses mains et pouvant garder à vie le pouvoir comme en Afrique.
Le CEP bidon a déjà annoncé la couleur et montré clairement quelles « élections démocratiques » il comptait organiser en Haïti en excluant de sa propre autorité 40% de l’électorat.
Selon une source digne de foi appartenant au camp des partisans du référendum anticonstitutionnel, les gens des Nations Unies qui conseillent le pouvoir auraient recommandé à ce dernier de fausser les résultats de manière intelligente et de choisir le score de 57% de OUI plutôt que celui de 99% de OUI, pour donner une sorte de vernis de crédibilité à la mascarade référendaire qu’il prépare. En revanche, notre interlocuteur n’a pas pu nous renseigner sur le nombre approximatif de votants qui serait choisi par le CEP bidon.
Changer la Constitution d’un pays arbitrairement et illégalement par un coup de force implique nécessairement pour ses auteurs un coût politique très élevé. Nos hommes sont-ils prêts à le payer ? Ils veulent le beurre et l’argent du beurre. Ils croient pouvoir mystifier tout le monde comme ils veulent.
Il est extrêmement regrettable que la PNH, qui est supposée être une institution neutre au service du peuple, se convertisse en une entité au service d’un pouvoir politique en place en participant activement à la réalisation d’une opération manifestement anticonstitutionnelle. À terme, cela lui coûtera très cher en fait d’image, de sympathie et de capital de confiance auprès de la population. Elle va y perdre beaucoup de plumes. En effet, ce serait absolument désastreux pour la police d’être perçue par les citoyens comme l’auxiliaire ou comme la milice d’un régime. A terme, cela signifierait la mort de l’institution policière dans laquelle tant a été investi.
Si les résultats du référendum anticonstitutionnel sont préparés d’avance, le peuple a lui aussi rejeté d’avance ce référendum et ses résultats, et il ne se sentira lié en aucune façon par la «constitution» frauduleuse qui sortira de ce processus en tout point immoral. Il n’ira pas voter pour deux raisons, d’abord ce serait valider, légitimer et reconnaître une chose fondamentalement anticonstitutionnelle, ensuite parce qu’il sait très bien que ses bulletins NON ne seront jamais réellement comptabilisés par le CEP fantoche qui n’inspire confiance à personne, sauf peut-être à mesdames Sison et La Lime. Il continuera cependant à faire entendre son vote NON franc et massif dans les rues et sur le terrain. Les élections annoncées seront irrémédiablement compromises, à moins d’être une totale mascarade.
Le Premier ministre Claude Joseph et l’ancien président Boniface Alexandre sont récemment montés au créneau pour défendre leur projet mais leur prestation n’a pas convaincu. Ils devraient pourtant savoir que la politique de l’action unilatérale et du fait accompli est vouée à l’échec et débouchera sur une impasse et sur une aggravation considérable de la grave crise sociopolitique actuelle dont il sera encore plus difficile de sortir.
Les Américains et les Européens se sont clairement prononcés pour l’organisation d’élections libres et contre le référendum mais ne sont pas parvenus jusqu’à présent à persuader leur protégé de renoncer à son référendum. Ils font toujours montre à son endroit d’une bienveillance et d’une complaisance déconcertantes. Peut-être qu’une action plus énergique de leur part auprès de l’intéressé aurait plus de chances d’aboutir ? A ce stade des choses, seule une forte pression internationale peut en effet le forcer à abandonner son projet anticonstitutionnel suicidaire, sinon nous courons tout droit vers une catastrophe. À moins que cette catastrophe ne soit précisément l’objectif poursuivi de manière tout à fait délibérée et cynique par les étrangers pour pouvoir imposer, selon eux, plus facilement dans le futur leur propre solution aux Haïtiens. En vérité, ce serait agir à très courte vue de leur part.
Le président Jovenel Moïse dit que sa nouvelle constitution est éminemment démocratique. C’est son droit de le dire mais il ne convainc personne. Il devrait savoir que les Haïtiens ont des yeux pour lire et un jugement pour se forger leur propre opinion. Tout ce qui est nouveau n’est pas forcément bon, et loin de là. Notre sagesse populaire ne dit-elle pas « Se vye chodyè ki kuit pi bon manje»?
Une chose est certaine : personne n’acceptera son référendum anticonstitutionnel, organisé par son CEP bidon, avec des résultats bidon et des élections bidon ni n’acceptera la dictature qu’il laissera en place derrière lui.
Dr Georges Michel