Le processus de négociations entamé par le chef de l’État autour de son CEP permanent se révèle jusqu’ici sans succès. Dialogue de sourds ? Les différents acteurs concernés restent soudés à leur position et n’entendent pas fléchir. Entre-temps, le Conseil se cherche entre permanent, provisoire et permanent conjoncturel.
De nombreux secteurs de la vie nationale, notamment la classe politique, les organismes de droits humains, les organisations socioprofessionnelles et même des parlementaires optent pour la formation d’un conseil électoral provisoire. Les partis politiques comme l’Organisation du peuple en lutte (OPL), la fusion des sociaux-démocrates, le Rassemblement des démocrates nationaux progressistes (RDNP), le Parti Konvansyon inite démocratique (Kid), le Parti libéral haïtien (PLH), le Parti Aksyon pou konstui yon Ayiti òganize (AKAO), Fanmi Lavalas sont montés au créneau pour dénoncer la mise en place du Conseil électoral permanent.
Les jeux se corsent. Le président de la République n’entend nullement revenir sur sa décision de former un CEP permanent. Les adeptes du provisoire contestent. Ils menacent de bouder les prochaines élections si M. Martelly persiste dans la voie qu’il a déjà empruntée.
Le professeur Sauveur Pierre Etienne, coordonnateur national de l’Organisation du peuple en lutte (OPL) croit qu’il est impossible de mettre en place un Conseil électoral permanent. Car, dit-il, le processus ayant conduit à la mise en place de ce qu’il appelle le « Conseil électoral présidentiel » est vicié à la base. « C’est un CEP mort-né, fruit d’un amendement contesté et d’un CSPJ décrié » a-t-il fulminé en invitant le chef de l’État ainsi que son staff à prendre acte que leur CEP a fait fausse couche et qu’ils doivent rectifier le tir. « C’est le pouvoir qui a la prérogative d’organiser les élections certes, mais il convient à l’opposition de les évaluer » a fait remarquer sauveur Pierre Etienne tout en appelant le président de la République à entendre la voix de la sagesse qui n’est autre que celle de l’opposition et de la société civile.
Crise de confiance ?
Pour Sauveur Pierre Etienne et Jean Hénold Buteau, la notion de confiance est fondamentale dans tout processus électoral. En ce sens, disent-ils, le conseil appelé à organiser les prochaines élections, doit avant tout inspirer confiance aux acteurs. Malheureusement, croient-ils, tel n’est pas le cas. À leur avis, les six conseillers installés au CEP n’inspirent pas confiance autant pour les institutions qui les ont désignés.
Pour étayer sa thèse, Sauveur Pierre Etienne a même évoqué le cas du président du CSPJ, Me Anel Alexis Joseph qui avait plus de 65 ans lors de sa nomination à la Cour de Cassation. Ce qui est contraire, dit-il, à la loi sur la fonction publique. Dans la même veine, le Dr Buteau croit que la mission du CSPJ a été dénaturée dans l’amendement constitutionnel.
Dans cette perspective, se basant sur les tohu-bohus qui entourent la mise en place du Conseil électoral permanent, le patron de l’OPL pense que seul un conseil électoral provisoire formé avec des personnes respectables et intègres peut aider à dénouer la crise.
L’intérêt des adeptes du provisoire…
« Il s’agit d’une question de principe. L’OPL est contre l’amendement de la Constitution. Parmi les huit versions d’amendement qui était en circulation, nous ne savons pas exactement quelle version a été publiée », a lancé le professeur Pierre Etienne. A son avis, l’intérêt du parti qu’il dirige se trouve dans la normalisation des institutions, voie par laquelle doit passer l’avenir du pays.
Jean Hénold Buteau voit aussi dans l’amendement de la Constitution tel qu’il est publié, une menace contre les acquis démocratiques ainsi qu’à la participation populaire. L’exclusion des collectivités territoriales du processus de désignation des membres du Conseil électoral permanent serait, selon ces leaders politiques, un coup de force constitutionnel. Crise institutionnelle, crise constitutionnelle, crise de confiance, crise préélectorale, le pays s’enlise et l’avenir devient de plus en plus incertain. Comme palliatif, Sauveur Pierre Etienne opte pour une solution haïtienne afin d’éviter l’immixtion de l’international dans les affaires du pays.