Corps bronzés en sueur qui dansent au rythme contagieux de la samba: ce scénario érotique se répète à chaque coin de rue de Rio de Janeiro pendant le carnaval, une fête où tous les excès sont permis. La « grande folie » commence officiellement vendredi quand le maire Eduardo Paes remettra symboliquement les clés de la ville au gros roi Momo, symbole de tous les excès, pour son règne de cinq jours.
L’apothéose de la fête sont les deux nuits de luxueux défilés des écoles de samba sur le Sambodrome. Mais depuis 15 jours déjà, une multitude de fêtards a pris d’assaut les rues, pendant les week-ends, pour défiler dans les « blocos » (groupes carnavalesques de quartier), considérés comme le carnaval « authentique », car ouvert à tous. Ils veulent oublier la récente tragédie de Santa Maria, dans le sud du pays, où un incendie dans une discothèque s’est transformé en piège mortel pour 239 jeunes gens.Dans ces blocos, on peut être déguisé ou pas, il suffit de danser, de s’amuser et de draguer, le tout bien arrosé à la bière pour combattre la chaleur. Les façades des immeubles du centre administratif de Rio sont protégées des centaines de milliers de fêtards par des grilles et la police a renforcé la sécurité dans la ville qui accueillera la Coupe du monde de football de 2014 et les jeux Olympiques de 2016.Les autorités de Rio prévoient que plus de 900.000 visiteurs (+5,8% par rapport à 2012) dépenseront quelque 665 millions de dollars pendant cette fête considérée comme la plus grande du monde à ciel ouvert.
Ipanema, Madureira et autres…
Le carnaval de Rio est connu mondialement pour ses défilés exubérants sur le Sambodrome – ou « passerelle de la samba » – bordé de gradins pour 72.500 spectateurs privilégiés, conçu par le célèbre architecte Oscar Niemeyer, décédé en décembre à presque 105 ans. Les thèmes des défilés des 12 principales écoles de samba qui se disputent le titre prestigieux de « championne du carnaval » vont de Vinicius de Moraes, l’un des auteurs de la célèbre chanson « la Fille d’Ipanema », à un hommage au quartier populaire de Madureira où la samba est dans tous les coeurs. »Vinicius aurait eu 100 ans cette année et c’est l’une des figures les plus importantes de la culture brésilienne », a déclaré Alex de Souza, metteur-en-scène du défilé de Uniao da Ilha qui rend hommage au père de la Bossa Nova. Les écoles feront voyager le spectateur en Amazonie mais aussi hors des frontières du Brésil, en Allemagne (pour Unidos da Tijuca) et même en Corée du Sud avec l’école Inocentes de Belfort Roxo.Chaque école a dépensé de deux à cinq millions de dollars pour organiser son défilé autrefois exclusivement financé par les mafieux des jeux clandestins, mais de plus en plus aujourd’hui par des entreprises brésiliennes et étrangères. A la Cité de la samba, dans la zone portuaire, où sont situés les ateliers des écoles de samba, des centaines d’artisans s’affairent depuis des mois à confectionner chars et costumes.
Une passion
Robson et Ana Paula sont mariés depuis 22 ans et cela fait 22 ans qu’ils sont « porte-drapeau » de leur école de samba, l’une des fonctions les plus prestigieuses du défilé où ils évoluent gracieusement devant les jurés en tournoyant avec leur drapeau. Cette année ils débutent dans la célèbre Portela, « un honneur », pour ces passionnés de carnaval. Mara de Oliveira, 39 ans, défilera avec la « bateria » (les percussionnistes) de l’école Mocidade Independente, enceinte de huit mois. »Le docteur m’a dit que je pouvais », confit-elle pendant une répétition générale sur le Sambodrome qui attire des milliers de fans de ces écoles qui ne pourront pas se payer les places des deux nuits des défilés officiels (dimanche et lundi). Les écoles invitent souvent des stars locales pour donner plus de glamour à leur défilé. Le footballeur Neymar, un amoureux du carnaval, a été ainsi invité par Mocidade Independente mais n’a pas encore confirmé sa participation.