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Le phénomène Madan Papa en Haiti

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Men madan papa._Dj Holore mix - YouTube

Men Madan Papa !

Par Winnie H. Gabriel Duvil

Lancé fin 2016 par Marinad 007, un jeune artiste du quartier de Cité Soleil, « Madan Papa » n’a pas attendu longtemps pour gagner en popularité. Dans les clubs huppés des beaux quartiers ou dans les discothèques des quartiers populeux, des jeunes à quelque classe qu’ils appartiennent dansent et chantent sur ce morceau rabòday. C’est le cas chaque dimanche au Champ de Mars ou à Pétion-Ville où des milliers de jeunes fredonnent cette chanson dans les activités pré-carnavalesques. Musicalement la chanson n’a rien d’original, mais la réalité qu’elle décrit fait débat. Et pour cause, « Madan Papa » c’est le nouveau nom attribué aux chercheuses d’or, ces jeunes femmes qui sortent avec des hommes nettement plus âgés qu’elles, pour des raisons financières .

Dans un reportage diffusé ce mardi 24 janvier 2017 sur les ondes de la radiotélévision Caraïbes, Michel Joseph, Prix Philippe Chaffanjon du reportage multimédia 2016, a été à la rencontre des « madan papa ». Et visiblement, telle que le sous-entend Jean-Philippe Maçon dit Marinad 007 dans sa musique, c’est une relation où l’amour et les sentiments chevaleresques n’ont aucune place. Une « madan papa » est une jeune femme qui fait le choix de sortir avec des hommes, nettement plus âgés qu’elle, « un papa » afin de se faire entretenir. De pouvoir s’offrir les biens auxquels elle n’aurait droit si elle sortait avec des jeunes de son âge souvent dans l’infortune. « Fanm ki mandan papa se fanm k’ap kouche ak lepè » dit le refrain.

Ils sont légion ces femmes qui se retrouvent dans cette catégorie. Et la précarité économique aidant, elles augmentent de plus en plus. Si certaines n’en parlent guère et n’en tirent aucune fierté, d’autres s’affichent et trouvent même des justificatifs à ce comportement. Loin de s’offusquer d’être une « madan papa », une de ces jeunettes affirme : « Je n’accepterais que personne dise du mal des papas. Je les adore. » Une autre avoue « J’ai fait ce choix parce que c’est celui qui s’est présenté à moi. Je suis sortie avec des jeunes de mon âge au début. Mais au fil du temps, je me suis mise à fréquenter des papas. Ce qui n’est pas un problème d’après moi. Je suis à l’aise. » « Je sors avec des gens plus âgés que moi, paske se yo k’ap jere m. kap banm sam bezwen. Avèk yo m plis alèz » dit sans ambages une autre.

Madan papa, prétexte pour parler d’une réalité plus profonde « Naturellement, je ne suis pas fan du Rabòday. Quand j’ai écouté « Madan papa » pour la première fois, je n’y ai pas accordé grande importance. Vu que c’est un tube à succès, le fait d’écouter régulièrement m’a attiré l’attention, et j’ai analysé profondément le texte de la chanson qui décrit une triste réalité dans la société. Tout le monde chante et danse au rythme de cette chanson à succès sans être pourtant conscient de l’ampleur de la situation. Je voulais surtout aller plus loin que la chanson » confie Michel Joseph qui a voulu toucher la plaie du doigt, « dire bien haut ce que les gens disent tout bas. «J’ y ai puisé un bon sujet de reportage » ajoute celui qui a voulu surtout accorder la parole à la catégorie ciblée.

Qui sont-elles ? Qu’est ce qui explique leur choix ? comment comprennent-elles le regard de la société ? Quand on dit Madan papa, au prime abord, on aperçoit des jeunes filles, à peine sortie de l’adolescence, mais ne dépassant pas encore la trentaine. De jeunes écolières ou étudiantes appartenant à des familles économiquement faibles ou livrées à elles -mêmes. Un fait courant En effet, dans les bars, les bals à Port-au-Prince, de nuit comme de jour, il n’est pas rare de voir des jeunes demoiselles se pavaner aux bras d’hommes qui pourraient être leur père, si ce n’est leur grand-père. Au nom de l’adage l’amour n’a pas d’âge, il serait prétentieux de les juger certes.

Mais fort souvent dans ces histoires, l’amour est une variable négligeable, souvent absent. Une situation qui dérange L’écart d’âge entre les gens en couple a toujours suscité des commentaires. Ainsi sortir avec un homme qui pourrait être son père, ou son fils est fort souvent fort mal perçu. Outre l’aspect financier que l’on critique, les femmes mariées, y voient dans ces jeunettes, une menace pour leur couple. Les papas sont en général des hommes qui ont déjà fait leur vie. Donc souvent avec femme et enfants sous les bras. Les jeunes hommes aussi se voient menacés, car ils se voient ravir leur place par des aînés qui très souvent ne veulent que passer du bon temps. Mais beaucoup persistent, les papas offrent plus d’avantages que les jeunots qui trop souvent n’ont rien à offrir, sont volages et immatures.

D’autant plus qu’avec un papa, entretenir une autre relation avec un jeune de son âge ne pose guère de problème. Ce dernier très souvent profitant des largesses accordés par le papa à sa compagne. Se mettre à l’abri du besoin Ces jeunes femmes, ces « madan papa » laissent entendre sans chichi que l’intérêt économique est le principal mobile de ces relations. Elles veulent se mettre à l’abri du besoin. Alors, les papas, ces hommes qui possèdent déjà leur foyer, une certaine stabilité financière, pourvoient aux besoins de leurs conquêtes. Ils supportent les frais d’écolage, de nourriture, le loyer de la maison, l’acquisition de certains biens tels les smartphones et vont jusqu’à s’occuper de toute la famille.

Si certaines s’y glissent par goût du luxe ou du lucre, d’autres se croient obligées. « Je vis avec ma mère. Mon père ne s’occupe pas de moi. Lè lekòl la rive fòm peye. M nan nesesite » déclare une jeune femme. Sur les airs de cette chanson que l’on danse allègrement aux quatre coins du pays, se dessine la misère d’une couche de la population. Dans cette société qui n’offre pas grand-chose,mais qui demande beaucoup, les jeunes sont livrés à eux-mêmes, les jeunes femmes encore plus. « Madan papa » dépeint une réalité que l’on voit tous les jours, mais à laquelle on devrait prêter beaucoup plus d’attention. Car sous les jupons de ces relations librement consenties entre deux personnes majeures, c’est souvent une prostitution déguisée qui se laisse voir.

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