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La construction du canal de Panama est l’une des entreprises d’ingénierie les plus ardues et les plus audacieuses de toute l’histoire de l’humanité. Longue de 79,6 kilomètres, cette voie d’eau relie les océans Atlantique et Pacifique et permet au trafic maritime, composé pour l’essentiel de navires américains, d‘éviter de passer par le dangereux détroit de Magellan, réduisant ainsi de moitié la longueur du trajet.
Élaboré dans un premier temps par l’ingénieur français Ferdinand de Lesseps, le prestigieux concepteur du canal de Suez, ce projet de construction du canal interocéanique de Panama allait toutefois subir un échec lamentable. Cet échec fut essentiellement causé par les trop nombreuses pertes en vies humaines dûes aux maladies tropicales (1). Comme on sait, ce premier projet de percement du canal se termina par une retentissante banqueroute aussitôt suivie du fameux scandale de Panama qui éclaboussa toute la classe politique et financière de la troisième république.
Ce sont donc les Américains qui reprendront le chantier en 1904 après que des séparatistes panaméens, fermement soutenus par les troupes et la marine américaines, déclarèrent la province de Panama indépendante de la république de Colombie. C’était en 1903. Contrairement à Ferdinand de Lesseps, les Américains choisiront de construire un canal à écluses, écluses situées aux deux extrémités du canal. Accessible aujourd’hui aux bateaux de très fort tonnage, le canal interocéanique qui, depuis son inauguration appartenait au «Canal Zone», un territoire américain administré par Washington, a été intégralement rétrocédé au Panama par le président Jimmy Carter. En effet, le 31 décembre 1999, tous les soldats américains quittaient définitivement le fameux «Canal Zone», aujourd’hui exclusivement administré par le gouvernement du Panama.
Au moment où les Américains entreprirent de reprendre et poursuivre les travaux de construction du canal, ils affrontèrent les mêmes obstacles qu’avaient rencontré les Français auparavant, les redoutables maladies tropicales tueuses d’hommes comme la malaria, et cela sans compter les insectes piqueurs, les scorpions et autres serpents venimeux qui infestaient ces régions sauvages et inexplorées. Ils allèrent donc recruter la main-d’œuvre dans les Antilles, mais surtout… en Haïti. Les travailleurs haïtiens allaient étonner par leur endurance, leur ardeur au travail et puis surtout par leur incroyable résistance aux maladies tropicales. C’est en effet à la surprise générale que les Haïtiens se révélèrent capables d’affronter les mille dangers que cachait cette épaisse forêt vierge qu’ils allaient défricher, cette dense et inextricable végétation qui s’était montrée jusque-là, invincible.
Au moment de la rétrocession du canal de Panama, les commentateurs et historiens américains seront unanimes à reconnaître et à affirmer sur les grandes chaînes de télévision que, sans la participation des travailleurs haïtiens, jamais le canal n’aurait pu être inauguré en 1914 (2). Ils racontèrent tous à l’unisson et sans équivoque comment ces travailleurs haïtiens armés de leur seule machette ont affronté cette forêt vierge avec un courage impressionnant, une force invincible, indomptable.
Ces récits correspondaient en tous points à ce que me racontait mon père qui était lui-même un enfant à l’époque, et qui avait vu, me disait-il, ces milliers de travailleurs haïtiens avec leur petit chapeau de paille monter à bord des navires dans la rade du Cap-Haïtien, navires qui allaient les emmener sur le plus grand chantier du continent américain de l’époque, celui du canal de Panama. C’était autour des années 1910 et 1913. Aucun de ces travailleurs n’est retourné en Haïti. Ceux qui ont survécu aux menaçants périls de cette forêt dévoreuse d’hommes sont sans doute devenus des citoyens panaméens et leurs descendants portent des noms comme Antonio, Diego, Julio, Pedro, Ludovico, etc. Ce sont nos lointains cousins, les arrières-petits enfants des travailleurs haïtiens partis là-bas il y a de cela un siècle afin de vendre leur force de travail et aussi un peu pour changer le monde.
(1) Le célèbre peintre français, Paul Gauguin est allé travailler sur le chantier de construction du canal de Panama où il a bien failli mourir à cause des redoutables maladies tropicales. Notons ici qu’avant de se rendre au Panama, Gauguin avait séjourné quelque temps en Haïti, dans la ville de Jacmel.
(2) Juste après l’inauguration du canal en 1914, les Américains construisirent un phare sur l’île de la Navase, une île adjacente de la république d’Haïti dont ils avaient pris possession de force, cela afin de mieux surveiller la circulation maritime dans la zone.
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Charles Dupuy
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